L’administration, entendue au sens large (État, collectivités territoriales, établissements publics), peut être tenue de réparer les dommages qu’elle cause, que ceux-ci résultent d’une décision illégale, d’un comportement fautif ou d’une activité administrative qui crée un préjudice anormal.
Mais tous les dommages ne sont pas automatiquement indemnisables. Pour qu’une demande d’indemnisation aboutisse, plusieurs conditions doivent être remplies. En pratique, la constitution d’un dossier solide est essentielle, et le recours à un avocat peut s’avérer déterminant pour bien identifier et caractériser le préjudice subi.
Pour que la responsabilité de l’administration soit engagée, le dommage invoqué doit réunir les conditions classiques du contentieux indemnitaire :
Le dommage doit être directement causé par l’action ou l’inaction de l’administration. Le lien de causalité doit apparaître immédiat : un simple enchaînement indirect ou une répercussion lointaine ne suffisent pas à engager la responsabilité de la personne publique. Il s’agit d’une appréciation au cas par cas, souvent délicate.
Le préjudice doit également présenter un caractère spécial. Cela signifie qu’il doit dépasser les inconvénients que supportent normalement l’ensemble des administrés. Il ne peut s’agir d’un préjudice général ou diffus. Le juge administratif exclut ainsi ce qu’il qualifie de « minimum non indemnisable », qui varie selon les circonstances.
Seuls les préjudices certains peuvent être indemnisés. Cela recouvre :
Les préjudices actuels ;
Les préjudices futurs, à condition que leur réalisation soit certaine ;
Mais jamais les préjudices simplement hypothétiques ou éventuels.
Par ailleurs, si le préjudice est susceptible de disparaître ou de s’atténuer, le montant de l’indemnisation en tiendra compte.
Il est impératif que le dommage soit chiffrable (même s'il n'a pas à être totalement chiffré lors de la demande d'indemnisation). Cela suppose de pouvoir justifier les conséquences économiques, physiques ou psychologiques subies, parfois avec l’aide d’un médecin, d’un expert-comptable ou d’un avocat.
Il s’agit de tout préjudice affectant le patrimoine de la victime. Cela peut concerner :
La perte de revenus professionnels après une décision administrative illégale (exclusion irrégulière, refus de renouvellement d’un contrat, etc.) ;
Des dégradations causées à des biens privés par des travaux publics ;
Une absence d’entretien d’ouvrage public ayant entraîné des accidents ou sinistres.
La réparation peut être :
En nature, lorsqu’un retour à l’état antérieur est possible ;
Par équivalent, sous forme d’une indemnité compensatoire.
Le préjudice corporel est l’atteinte portée à l’intégrité physique ou psychique d’une personne, à la suite d’un événement dommageable.
Il regroupe l’ensemble des conséquences d’une blessure, d’un accident ou d’une agression sur la santé de la victime.
Il comprend plusieurs composantes, par exemple :
les souffrances physiques (douleur)
le déficit fonctionnel permanent (handicap)
le préjudice esthétique
le préjudice d’agrément (impossibilité de pratiquer certaines activités)
le besoin d’assistance par une tierce personne
Le préjudice corporel donne lieu à une réparation financière souvent importante, évaluée à partir d’expertises médicales.
Le dommage moral ne repose pas sur une perte économique, mais sur une atteinte à l’intégrité psychologique ou à la dignité de la personne. Il recouvre par exemple :
Les atteintes à l’honneur ou à la réputation ;
Les souffrances morales causées par une décision injuste ou brutale ;
Les troubles graves dans les conditions d’existence.
Ce type de dommage est plus difficile à évaluer, mais il peut donner lieu à indemnisation, en particulier lorsqu’il est bien étayé.
Même s’il existe des référentiels jurisprudentiels, le juge administratif conserve une marge d’appréciation importante. Il évalue le montant de l’indemnisation au cas par cas, selon les pièces et arguments produits.
Dès lors, la constitution d’un dossier clair, complet et juridiquement étayé est essentielle. Cela suppose :
L’identification rigoureuse du fait générateur du dommage ;
La démonstration du lien de causalité ;
La présentation de justificatifs chiffrés, objectifs, et crédibles.
L’intervention d’un avocat peut alors s’avérer décisive, en particulier pour déterminer la stratégie de recours (gracieux ou contentieux), chiffrer le préjudice, mobiliser les textes pertinents et sécuriser juridiquement les demandes.