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Invoquer l’incompétence de l’auteur de l’acte contre une décision administrative

Par Me Matthieu Rouveyre • Dernière mise à jour le 16 mai 2025

En droit administratif, il est d’usage de distinguer les illégalités externes, qui affectent les conditions d’édiction de l’acte (comme les vices de forme ou de procédure), et les illégalités internes, qui concernent son contenu (l'erreur de droit, l'erreur de fait, l'erreur manifeste d'appréciation, le détournement de pouvoir). Parmi les vices d’illégalité externe figure l’incompétence, qui touche au fondement même de la légalité de la décision. Elle peut justifier à elle seule l’annulation d’un acte administratif.

Incompétence de l'auteur de l'acte
Sommaire
  1. Que signifie « incompétence » de l’auteur de l’acte ?
  2. L’incompétence peut être soulevée d’office par le juge
  3. Établir l’incompétence n’est pas toujours chose aisée
  4. L’incompétence entraîne en principe l’annulation de la décision
  5. Quelques décisions illustrant l’admission de ce moyen par les juridictions administratives

Que signifie « incompétence » de l’auteur de l’acte ?

Une décision administrative ne peut être légalement prise que par une autorité compétente pour l’édicter. Cela suppose que l’auteur de l’acte ait reçu une habilitation légale ou réglementaire pour le faire. Il peut s’agir d’une compétence propre, ou d’une délégation de signature ou de pouvoir, à condition que cette délégation ait été légalement établie, publiée et respectée.

L’incompétence est souvent soulevée dans des cas où la décision est prise par délégation, sans que cette délégation ait été régulièrement établie ou publiée, ou lorsque l’acte a été pris en dehors du champ de cette délégation.

L’incompétence peut être soulevée d’office par le juge

Le juge administratif peut, lorsqu’il constate que l’auteur de la décision contestée n’avait pas compétence pour l’édicter, annuler l’acte d’office, même si ce moyen n’a pas été expressément invoqué.

Dans les faits, il est cependant vivement recommandé de soulever ce moyen dès le recours, en particulier parce que l’administration n’est pas toujours en mesure de démontrer facilement la légalité de la délégation ou de la signature.

Établir l’incompétence n’est pas toujours chose aisée

Vérifier la compétence de l’auteur de l’acte suppose un travail minutieux :

Il s’agit souvent d’un travail de fourmi, impliquant de consulter des arrêtés parfois mal publiés ou anciens. C’est précisément le rôle de l’avocat d’effectuer ces vérifications, qui peuvent conduire à l’annulation de la décision attaquée.

Au sein du cabinet, nous avons l’habitude de vérifier la compétence de l’auteur des décisions dans divers dossiers, notamment :

Comme l’a rappelé une rapporteure publique :

« L’incompétence, réputée mère de tous les vices, parce qu’elle touche à la condition même de possibilité d’édiction de l’acte » (A. Bretonneau, conclusions sur CE, Ass., 18 mai 2018, Fédération des finances et des affaires économiques de la CFDT).

Contrairement à d’autres vices (comme certains vices de procédure), l’incompétence n’est pas régularisable a posteriori, sauf cas très exceptionnels. Elle conduit en principe à l’annulation pure et simple de la décision.

Quelques décisions illustrant l’admission de ce moyen par les juridictions administratives

Radiation illégale d’un fonctionnaire de La Poste – Tribunal administratif de Bastia, 5 mai 2025

Un cadre de La Poste, placé en congé pour raison de santé, est radié des cadres pour abandon de poste. Or :

Le tribunal a annulé la décision de radiation, aux seuls motifs d’incompétence des signataires.

(TA Bastia, 1ère ch., 5 mai 2025, n° 2301569)

Refus d’aide exceptionnelle à la région Occitanie – Tribunal administratif de Paris, 30 avril 2025

La région Occitanie avait été exclue d’un dispositif d’aide exceptionnelle aux autorités organisatrices de la mobilité, institué par un arrêté du ministre de la transition écologique.

Le tribunal a jugé que le ministre n’était pas compétent pour prendre un tel arrêté : la loi de finances ouvre des crédits, mais n’habilite pas le ministre à édicter seul les règles d’attribution de l’aide.

(TA Paris, 30 avril 2025, n°s 2320642 & 2320643)

 

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